Leadership & algorithmes, de quoi parle-t-on ?

La tech réfère aux technologies mathématico-informatiques data, algo, IA etc. au service d’innovations numériques massivement réplicables. Elle présente autant de promesses que de pièges pour l’entrepreneur. Les promesses de gains durables de productivité, de transformation de l’expérience et du modèle économique proviennent fondamentalement de l’automatisation personnalisée et apprenante. Souvent si radicales qu’elles conduiront à consolider massivement le leadership des entreprises. leurs marges et l’engagement des collaborateurs; ou a contrario à vulnérabiliser grandement la position concurrentielle de celles qui les ignorent. D’où l’enthousiasme massif des fondateurs & investisseurs pour une communication tech & des investissements notables de R&D.

Porteurs d’automatisation personnalisée et apprenante, les algorithmes sont des sinequanon du leadership économique

Mais dans la réalité, la création de valeur grâce à la tech n’est pas nécessairement là où l’on l’attend. Bien pire, le piège classique de l’activité technologique consiste à développer la technique pour la technique, en devenant esclave de la complexité auto-génératrice et en perdant pied sur les finalités réelles, avec de lourdes conséquences tant humaines qu’environnementales, comme l’a théorisé notamment le philosophe J. Ellul dans “le Système Technique”. De fait, l’expérience concrète révèle trop souvent hélas le tropisme naturel des équipes tech à rivaliser de goût pour la sophistication à la mode. En tombant dans les graves pièges mathématiques de surapprentissage, divergence prédictive ou d’irréguralités incontrôlées. En divergeant plus ou moins consciemment de la proposition de valeur réellement perçue et achetée par les clients. En développant à grands coûts et délais des systèmes en réalité incohérents quand on prend la peine d’ausculter en détail la valeur client. D’une complexité déraisonnable et énergivore, dépassant subrepticement la maîtrise objective par ses concepteurs, voire franchement inutiles ou jamais livrés

Ne jamais laisser la tech s’auto-diriger, c’est insensé (et bientôt illégal ?)

Plus sournoisement encore, le déploiement opérationnel de la tech modifiant fortement les métiers et les usages soulève des questions profondes sur le sens et les valeurs partagées par l’entreprise et ses parties prenantes, son identité et son mode de management: équilibre homme-machine, exclusion, compétences, autonomie, transparence, sobriété, justice, intégrité ...  En aboutissant parfois à de véritables crises de sens, au désengagement progressif des parties prenantes, si ce n’est à de véritables scandales sur la face cachée de l’usage de ces technologies. Et cela quand par ailleurs d’une part les lois et règlements français et européens ont progressivement encadré l’usage des données, algorithmes et bientôt de l’intelligence artificielle (RGPD, ActAI …). D’où l’obligation prochaine d’en documenter un grand nombre de garde-fous éthiques. Tout ceci quand la quête de sens devient le sujet n°1 pour le recrutement de bons nombres de talents dans a besoin l’entrepreneur.

Pas de fatalité à subir une tech inexplicable et énergivore: exiger au contraire la simplicité et l’alignement à 360.

C’est immensément dommageable car, bien maîtrisée par les entrepreneurs, la tech peut grandement servir la stratégie, et doit permettre la réussite scalable d’une véritable proposition de valeur. Il n’y a en réalité aucune fatalité à faire compliqué quand on pourrait, de manière bien plus simple, moins coûteuse et énergivore, servir la même valeur au client. Aucune fatalité non plus à ce que le CEO ne comprenne plus la R&D, c’est au contraire souvent un signe avant-coureur d’une ineptie technologique. Peu d’expérience tech conduit à la complexité, beaucoup d’expérience apprend l’impérieux besoin de simplification : il faut justement y travailler, investir de l’intelligence humaine, de l’expérimentation et de l’audace pour y parvenir. En dirigeant par une organisation agile durablement exigeante sur l’alignement entre sens, stratégie d’affaires et incréments technologiques. Avec notamment une forte fonction produit assujettissant de manière lucide la technologie.

Ne pas se résigner à l’ethic-washing : il y a tant de profondeur et de sens authentique à donner aux affaires algorithmiques.

La réussite de telles transformations gagne au discernement d’une véritable trajectoire de raison d’être qui n’a aucune raison de s’abaisser à l’ethic-washing ou la RSE paresseuse. Car la connaissance intégrale des algorithmes montre l’importance de la marge de manœuvre qui y réside pour promouvoir un modèle d’intégrité professionnelle, de justice et d’équilibre auquel on croit réellement. Il n’y a aucune fatalité à subir une automatisation déraisonnée de fonctions, la suppression de compétences humaines, un pillage de données inavouable, des calculs massifs et énergivores ou des préférences obscures de moteurs de recommandation et imposées par des tiers : celle-ci doit au contraire être choisie en traduisant une proposition de valeur authentique et originale pour l’entrepreneur. Et il y a tant de défis dans la transformation du monde et tant d’épaisseur humaine dans les affaires qui bénéficient grandement de la puissance des services algorithmiques : tous légitimes qu’ils soient, le changement climatique et la lutte contre les discriminations ne sauraient être les parangons exclusifs du sens à donner aux entreprises algorithmiques à impact. Autant d’occasions d’accroître la confiance des clients et parties prenantes et de construire une barrière concurrentielle plus solide que des chimères, en réinventant le positionnement original de l’entreprise et un sens durable à l’engagement.

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